06 février 2018

Et la poule au pot tous les dimanches ?

Décidément l'actualité ouistrehamaise tourne autour de la nourriture ces derniers temps. Après le scandale de la facture de restaurant que le maire s'efforce de banaliser aujourd'hui en affirmant que certains convives auraient payé - on attend impatiemment les preuves - on nous sert l'affaire des repas de substitution.

La tambouille de Madame Chauchard


Qu'est ce qu'un repas de substitution ? En gros, et sans parler des régimes alimentaires faisant l'objet d'un Projet d'Accueil Individualisé pour les enfants allergiques, il s'agit de servir un repas sans porc aux enfants dont la religion interdit la consommation de l'animal à la queue en tire-bouchon... La quasi totalité des communes pratiquent cette facilité. A quelques exceptions près comme celles médiatisées de la commune de Beaucaire (Front National) ou de Chalon-sur-Saône dont la décision a été retoquée par le Tribunal administratif de Dijon. On y ajoutera aujourd'hui notre bonne ville de Ouistreham, puisque en catimini, la commission municipale restauration, lors de sa réunion du 19 décembre 2017, a pris une décision surprenante.

"Point sur les repas de substitution : Jusqu’à présent, des repas de substitution étaient proposés pour les enfants qui ne mangeaient pas de porc. Mme Chauchard informe les membres de la commission que désormais, cela ne se produira plus. En effet, les écoles concernées étant laïques, il est décidé de ne changer aucun menu pour des raisons religieuses. De la même façon, le poisson ne sera pas servi systématiquement le vendredi.(Extrait du compte-rendu adressé aux associations de parents d'élèves).




A la fortune du pot...


Les élus des deux communes précitées (Beaucaire et Chalon-sur-Saône) en avaient débattu, elles, en conseil municipal. A Ouistreham, on a préféré une discrétion coupable... C'est vrai qu'on a déjà pas mal de procès sur les bras...! L'opposition a néanmoins posé une "question diverse" au conseil du 29 janvier. Madame Chauchard, maire adjointe aux affaires scolaires, avait concocté une réponse étrange qu'elle a bredouillé en séance. "On ne les supprime pas parce qu'il n'y en avait pas..." Pas de pot !? Or elle prétend, dans le compte-rendu, les supprimer, c'est donc qu'il y en avait ! Bon, en fait, les municipalités précédentes n'avaient jamais formalisé les dispositions en la matière ; c'est sans doute un tort, mais les enfants concernés disposaient d'un repas sans porc. Du coup le maire en a rajouté, évoquant la transmission d'une culture, de valeurs... Bon, sans doute l'influence d'une récente rencontre avec une députée FN ; il faut bien donner des gages...! Et cette naïveté, cette candeur chez la blonde adjointe, d'ajouter qu'il n'y aura plus désormais de poisson le vendredi. On sait, et pourtant on n'est pas spécialiste, que l’Église n'en fait plus depuis longtemps une obligation. Et pourquoi pas l'abstinence pendant le carême... Sauf le dimanche disait-on...!

Et si on en remettait une louche ?


On ne vous fera pas la morale comme notre bon maire nous le reproche ; on se contentera de citer largement l'édito de Thomas Legrand le 10 janvier dernier sur France Inter. Il a magistralement, comme toujours, traité le problème en question.

Les repas de substitution sont généralisés en France

Et là, il faut clarifier encore une fois ce débat, enlever le papier peint laïc de ce qui n’est qu’une politique raciste, un acte de maltraitance. Ce genre d’action, prise sous le sceau de la laïcité, est un non-sens. Ce qui serait un accroc à la laïcité serait qu’une municipalité cède à une demande de particularisme religieux à la cantine, c’est-à-dire fournisse des repas kasher ou hallal, par exemple. [...] En revanche, que la collectivité mette en place, le jour où il y a du porc, un repas tout simplement sans porc, c’est ça l’attitude de facilitation laïque de base. Si l’école publique n’a pas à fournir de repas confessionnels, bien sûr, elle n’a pas à pénaliser les enfants en raison des habitudes ou interdits religieux ou culturels dont ils ne sont pas responsables. Le maire de Beaucaire, qui prétend défendre les valeurs de la République en coinçant les enfants entre un interdit religieux et un interdit administratif, agit, en réalité, à l’inverse. Il n’y a rien d’anti-républicain dans le fait de servir du poisson, du bœuf ou un repas végétarien le jour où il y a aussi du porc. Ce qui est exaspérant avec ce débat c’est que les trafiquants de laïcité frelatée, comme le maire de Beaucaire, font passer l’idée saugrenue selon laquelle un menu sans porc serait un menu communautaire ou de mauvais Français. Oui et cette histoire est l’exemple même du scandale absurde qui, à force d’être mouliné, gène le combat idéologique, philosophique nécessaire contre les vrais accrocs à la laïcité et empiétement de l’islamisme dans les consciences de ceux qui se sentent rejetés. Parce qu’effectivement, dans les cantines, tout se passe relativement sans encombre, ni surcoût puisque la plupart des selfs proposent quotidiennement déjà plusieurs choix de plats. Il n’y a d’ailleurs (à un ou deux maires LR près et ce maire FN de Beaucaire) plus personne pour soulever cette question. L’affaire semblait réglée pour tout le monde quand, en 2016, en reprenant la tête de LR, Nicolas Sarkozy avait eu l’idée, dans sa stratégie «d’identitarisation» de sa campagne pré-présidentielle, de prévoir l’interdiction des repas de substitution. «La république ne doit plus céder» disait-il, bravache. Il avait missionné Gérald Darmanin et Henri Guaino (à l’époque encore sarkozystes… le temps passe) pour faire un tour de France des municipalités LR confrontées à ce problème… ce fut vite fait puisqu’il n’y avait pas de problème. [...]

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